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Les goûts et les couleurs


Je ne suis pas du genre à prendre la parole, en public ou en privé, pour déverser mes états d’âmes. Mais que faire lorsque le public vient fourrer son nez dans ma vie privé ? Je voudrais donc clarifier la situation. J’aime le chou cru et je n’ai pas peur de l’admettre. Enfin, plus peur de l’admettre. Pendant trop longtemps le regard des autres m’a fait baissé le mien mais aujourd’hui c’est terminé. Je relève la tête et, prêt à accueillir les quolibets de la horde, je crie haut et fort que j’aime le chou cru ! Eh quoi qu’y a-t-il de si terrible ? Est-ce interdit par la loi ? Non. C’est parfaitement légal. D’ailleurs beaucoup de gens mangent du chou mais presque tout le monde le mange préparé d’une façon particulière et toujours cuit. Moi, je l’aime cru. Sa couleur, sa texture ferme et ses formes arrondis, tout chez lui me met en appétit. Mais malheureusement j’ai rarement pu m’adonner à mes plaisirs culinaires sans sentir une certaine gêne, comme un arrière-goût de culpabilité, sachant très bien la réaction des gens s’il m’avait vu me repaître du légume défendu. Trop longtemps leurs grimaces m’ont mis mal à l’aise mais désormais je leur réponds avec un sourire. Oui, j’aime le chou cru et très vert encore. Je veux que lorsque mes dents glissent sur sa peau je puisse sentir la chair prête à éclater au moindre croc. Vous faites la grimace, qu’importe ! À partir de ce jour vous devrez vivre sachant qu’un homme dans le monde vit librement sa passion pour le chou cru !



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